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Monnaie de singe

Bonjour à tous,
mardi c'est Marx Brothers au ciné-club! Le quatuor (puis trio) fantasque, révélé au théâtre, tourne en 1931 avec Monnaie de Singe son premier film original pour le cinéma (après deux transpositions de ses pièces à succès) et signe un des monuments du burlesque.
Groucho, Chico, Harpo et Zeppo voyagent clandestinement sur un bateau. Découverts par le capitaine, ils sont pourchassés mais parviennent à se cacher. Briggs, un bandit, trouve Groucho dans la cabine de sa fiancée et décide de l'engager au lieu de le tuer tandis que Chico et Harpo sont embauchés par Helton, son rival...
Vous pouvez voir un extrait du film ici ainsi qu'une présentation plus complète.
A mardi!
Adrien

Séance consacrée à Eric Rohmer



Bonjour à tous,
nous n'avions pas prévu en septembre, lors de la programmation que Ma Nuit chez Maud (projeté Mardi) serait l'occasion de rendre hommage à l'un des grands réalisateurs français, tout récemment décédé, Eric Rohmer. On espère toujours d'un tel réalisateur qu'il nous livre, à l'infini, de nouvelles oeuvres à découvrir, savourer, discuter. Peu d'auteurs d'ailleurs donnent comme Rohmer envie de discuter à l'infini, d'analyser les choix et idées de ses personnages, de se mettre à leur place et de parler comme eux. L'amour des histoires, l'amour des mots, voilà qui unit Rohmer à son public, voilà ce que nous voulons partager avec l'hommage que nous lui rendons.
Les deux films choisis font partie de deux périodes très différentes de l'oeuvre de Rohmer et du cinéma français, et pourtant vous pourrez voir à quel point ils sont semblables et uniques dans leur ton, leur liberté, leurs thèmes, lumineux d'intelligence.
Ma Nuit chez Maud, sorti en 1973 : Un jeune ingénieur, récemment revenu de l'étranger, remarque à la messe une jeune femme blonde et décide qu'elle sera sa femme. Il retrouve par hasard Vidal, un ancien ami communiste, qui l'invite à un dîner le soir de noël chez une amie divorcée, Maud. La soirée se passe en longues discussions sur le mariage, la morale, la religion, Pascal, à trois, puis à deux, mariant également sincérité et séduction... Critikat, comme souvent, publie une excellente analyse du film. Et bien sur la bande-annonce du film...
Conte d'Ete, sorti en 1996 : Gaspard, rennais, arrive en vacances dans la petite station balnéaire de Dinard, il attend sa copine, Lena, qui n’arrive pas. Il croise la serveuse étudiante en ethnologie Margot, qui veut une relation d’amitié, et Solène qui cherche une aventure, mais demande un grand respect. Gaspard hésite sur fond de chemins du bocage et du bord de mer, et de chansons de marins... La bande-annonce du film.
Tout cela sera précédé par un court-métrage, Hallali, d'Alexandre Bies, pour une grande soirée de cinéma, avec une petite collation entre les deux films de Rohmer pour se rafraîchir.
A mardi!

De l'ombre à la lumière - la programmation du ciné-club au second semestre

Bonjour à tous,
le premier semestre approche de sa conclusion avec l'hommage que nous rendrons mardi à Eric Rohmer à l'occasion de la projection de Ma Nuit Chez Maud, hommage à un grand conteur, à un des derniers de la nouvelles vagues. Idéale conlusion pour un semestre qui a présenté un vrai panorama des nouveaux cinémas, des cinéastes qui ont su changer l'histoire du 7eme art ou qui ont fait partie d'un mouvement rénovateur : créateurs (Fritz Lang) et fossoyeurs du grand Hollywood (Kazan, Sirk), mythes de la nouvelle vague (Truffaut, Resnais, Rohmer), leader du nouveau cinéma espagnol flamboyant(Almodovar) ou nordique satiro-burlesque(Kaurismaki), italien politico-intime (Moretti), stars du Nouvel Hollywood (Pacino et Hackman chez Schatzberg) et du cinéma indépendant américain (Jarmush) sans oublier la réception exceptionnelle d'un des meilleurs auteurs français modernes (Desplechin) et quelques OVNIS mélangeant animation, musique et cinéma (Taxandria, The Wall) Bref ce fut un vrai plaisir de vous faire découvrir et souvent de découvrir avec vous ces grands cinéastes.
S'il faut trouver un thème au second semestre, ce pourrait être "Ombre et lumière". Ou encore de la noirceur des sentiments ou des histoires, dans la lumière ou filmée lumineusement. Les Marx Brothers, qui ouvrent notre sélection, sont les plus lumineux, eux qui savent faire feu de tout bois et nous faire rire aux larmes à partir d'histoires de vagabonds ou de dictatures, par l'accumulation des situations délirantes et la liberté totale de leurs personnages. L'histoire de Lettre d'une inconnue de Max Ophuls (le 9 mars) montre comment les conséquences d'une vie peuvent se perdre dans l'ombre et n'apparaître qu'une fois la mort venue. Puis nous projetterons, quelques jours après le printemps, Fleur d'Equinoxe d'Ozu, un des cinéastes les plus lumineux de monde, mais aussi un des plus rigoureux analystes de la société japonaise.

Le 30 mars, nous recevrons l'équipe du film de Ne me libérez pas je m'en charge, qui montre comment on peut trouver la lumière à l'ombre. Puis ce sera Fellini, avec Ginger et Fred, l'histoire de deux comédiens sur le retour, vibrante satire de la société télévisuelle.
Elia Suleiman (Intervention Divine le 16 avril) est un des meilleurs illustrateurs de notre thématique : cinéaste palestinien, filmant une société assiégée et détruite, il n'est pas moins un des meilleurs cinéastes burlesques actuels. Nous ferons ensuite un passage par Hollywood avec Duel, le premier film de Spielberg (qui l'a amené sous les feux des projecteurs) et un grand western : Rio Bravo, d'Howard Hawks.
En mai, enlève ce qu'il te plaît. C'est la morale du film de Louis Malle, Milou en mai, comédie familiale provinciale en mai 68. Raymond Depardon, documentariste surdoué pour faire découvrir des univers et des hommes inaccessibles aux caméras, sera ensuite au programme du ciné-club avec un film sur un monde habituellement dans l'ombre : la justice. Délits Flagrants, et sa "suite" 10ème Chambre, Instants d'audiences, sont de vraies découvertes et de superbes moments de cinéma.
Si on recherche un cinéaste questionnant les rapports de l'ombre et de la lumière, comment ne pas penser à Martin Scorsese, qui de film en film a filmé des trajectoires de personnages passant de l'une à l'autre, souvent pour finir dans l'anonymat et le désespoir. Raging Bull, contant l'histoire du boxeur Jake La Motta, est un de ses plus grands films. Nous verrons ensuite Soleil Trompeur, d'un des meilleurs cinéastes russes actuels, Nikita Mikhailov (au cinéma cette semaine!) Puis deux films très lumineux, deux comédies douces-amères, Liberté-Oléron de Bruno Podalydès et Respiro d'Emmanuele Crialese. Sans oublier un des plus grands films de Woody Allen, un de ses films les plus noirs, Crime et délits.
Les dates suivantes sont indicatives, des changements pouvant avoir lieu selon les disponibilités des films.
En espérant vous voir nombreux pour découvrir tous ces superbes films.
et à mardi !

23 FÉVRIER 2010 – 20h30
MONNAIE DE SINGE – Norman Z. McLeod (1931) – 77’
Quatre passagers sont confortablement installés au fond de la cale d'un paquebot qui fait route vers New York. Non seulement, ils sont des passagers clandestins, mais en plus ils chantent en quatuor. C'en est trop pour le capitaine qui décide de les mettre aux fers. S'ensuit une folle course poursuite ou nos quatre lascars provoquent et vivent les situations les plus loufoques. Premier grand film des Marx Brothers.

9 MARS 2010 – 20h30
LETTRE D’UNE INCONNUE – M.Ophuls (1948) – 86’
Un célèbre pianiste vieillissant reçoit un jour une lettre d'une jeune femme inconnue de lui. Celle-ci lui retrace l'amour qu'elle a éprouvé secrètement pour lui depuis son enfance. Elle évoque les rares étreintes que ce volage amant voulut bien lui accorder …
En présence de Michel Ciment, de Positif.

23 MARS 2010 – 20h30
FLEURS D’ÉQUINOXE – Y.Ozu (1958) – 115’
Wataru Hirayama prend très mal l'affront que lui fait sa fille Setsuko en refusant le mariage qu'il a arrangé pour elle. Il va néanmoins rendre visite aux jeunes époux amoureux.

30 MARS 2010 – 20h30
NE ME LIBÉREZ PAS JE M’EN CHARGE – F.Godet (2008) – 107’
Ancien braqueur fiché au grand banditisme, Michel Vaujour a toujours préféré la fuite à la prison, l'aventure à la soumission, la liberté à la loi. En l'espace de 30 ans, il aura passé 27 ans en prison - dont 17 en cellule d'isolement - et sera parvenu à s'en échapper à cinq reprises avant d'obtenir une libération conditionnelle en 2003. Si cette vie trépidante l'a souvent exposé au pire, elle l'a aussi confronté à un incroyable face-à-face avec lui-même.
En présence de l’équipe du film

8 AVRIL 2010 (JEUDI) – 20h30
GINGER ET FRED – F.Fellini (1985) – 120’
Ginger et Fred, deux anciens danseurs de claquettes qui formaient un duo célèbre dans les années 1940, remontent sur scène au beau milieu des années 1980 dans le cadre d'une rétrospective organisée pour une émission de télévision. Seulement, les temps ont changé et la féerie du spectacle a laissé place à l'éphémère du monde publicitaire.


13 AVRIL 2010 – 20h30
INTERVENTION DIVINE – E.Suleiman (2002) – 92’
Es, un Palestinien vivant à Jérusalem, est amoureux d'une Palestinienne de Ramallah. L'homme est partagé entre son amour et la nécessité de s'occuper de son père, très fragile. En raison de la situation politique, la femme ne peut aller plus loin que le checkpoint situé entre les deux villes. Les rendez-vous du couple ont donc lieu dans un parking désert près du checkpoint.

20 AVRIL 2010 – 20h30
DUEL – S.Spielberg (1973) – 92’
Sur une route californienne, un modeste employé de commerce se voit pris en chasse par un énorme camion. Une course-poursuite effrénée s'engage...

27 AVRIL 2010 – 20h30
RIO BRAVO – H.Hawks (1959) – 141’
Un shérif arrête le frère de l'homme le plus puissant de la région. Il n'a pour alliés qu'un adjoint ivrogne, un vieillard boiteux, un gamin, une joueuse de pocker et un hôtelier mexicain, et contre lui une armée de tueurs.

4 MAI 2010 – 20h30
MILOU EN MAI – L.Malle (1989) – 108’
Une vieille dame s’éteint dans une grande demeure du Sud-Ouest. Son fils, Milou, qui a soixante ans et qui s'occupe de la propriété, convoque pour l'enterrement son frère Georges et sa belle-sœur Lily, sa nièce Claire, sa propre fille, Camille et le reste de la famille. Mais nous sommes en mai 1968. Depuis deux semaines Paris est à feu et à sang...

11 MAI 2010 – 20h30
SPÉCIAL DEPARDON
DÉLITS FLAGRANTS – R.Depardon (1994) – 105’
L'itinéraire procédural des personnes arrêtées en flagrant délit par la police de leur arrivée au dépôt jusqu'à l'entretien avec l'avocat.
Suivi d’un autre film de Raymond Depardon (à déterminer)

14 MAI 2010 (VENDREDI) – 20h30
RAGING BULL – M.Scorsese (1980) – 129’
Raging Bull retrace les moments forts de la carrière flamboyante de Jack La Motta, champion de boxe poids moyen. Issu d'un milieu modeste, il fut le héros de combats mythiques, notamment contre Robinson et Cerdan. Quand l'ascension et le déclin d'une vie deviennent épopée...

25 MAI 2010 – 20h30
SOLEIL TROMPEUR – N.Mikhalkov (1993) – 153’
A travers l'histoire de Dimitri et de Maroussia, hommage aux victimes et à tous ceux qui ont été brûlés par le soleil trompeur de la révolution.

1er JUIN 2010 – 20h30
LIBERTÉ-OLÉRON – B.Podalydès (2000) – 107’
Jacques, 38 ans, part en vacances à l'Ile d'Oléron avec ses quatre enfants. Lassé des jeux de plage, il a cassé sa tirelire pour s'acheter un voilier, version dériveur lesté, baptisé "Liberté-Oléron", avec lequel il a décidé de rallier l'île d'Aix, distante de cinq kilomètres. Bien qu'incompétent en voile, Jacques déclare à sa famille qu'il est le seul maître à bord.

8 JUIN 2010 – 20h30
CRIMES ET DÉLITS – W.Allen (1989) – 104’
Deux personnages contrastés : un ophtalmologue juif réputé, établi, a une liaison encombrante qui peut tout remettre en cause ; un documentariste idéaliste, honnête, tourmenté, qui semble voué au rôle de perdant, se voit proposer une grosse somme d'argent pour filmer un profil flatteur d'une star pompeuse de la télévision. Chacun va devoir prendre une décision irrévocable ...

15 JUIN 2010 – 20h30
RESPIRO – E.Crialese (1989) – 90’
Lampedusa est une île perdue au sud de la Sicile, belle et aride, avec sa mer d'un bleu parfait, sa communauté de pêcheurs, ses bandes d'enfants bagarreurs, ses familles solidaires mais jalouses. La vie y est immuable : aussi rassurante qu'étouffante, aussi charmante que cruelle.

Mirage de la vie

Retour à Hollywood pour la prochaine étape du ciné-club, avec MIRAGE DE LA VIE, de Douglas Sirk (sorti en 1959 et ressorti en 2008) Dernier film hollywoodien de Sirk (qui retourne en Allemagne après ce film et stoppe pour 15 ans la réalisation), ce film préfigure la renouveau du cinéma hollywoodien à la fin des années 60 (le Nouvel Hollywood dont L'Epouvantail fut un exemple) aussi bien par ses thèmes (l'analyse et la satire de la société américaine blanche, paternaliste et raciste, le désir de liberté, la prévalence des apparences) que par l'écoeurement de Sirk vis à vis du vieux Hollywood, le désir de rénovation du modèle des studios qui le conduira a arrêter sa carrière américaine.
Lora Meredith, jeune veuve désireuse de devenir comédienne, fait la connaissance d’Annie Johnson, une femme noire dont la fillette, Sarah Jane, a la peau blanche. Sarah Jane et Susie, la fille de Lora Meredith, se lient d’amitié et posent sur la plage de Coney Island pour le photographe amateur Steve Archer. Unissant leur infortune, Lora et Annie décident de vivre et d’élever leurs fillettes ensemble jusqu’à ce que le tourbillon du destin s’en mêle...
Le film sera présenté par Raphaël Lefèvre, dont vous pouvez lire les excellents commentaires sur Critikat.
Ne ratez pas aussi la bande-annonce du film, et surtout n'oubliez pas de venir mardi !

On connaît la chanson - le synopsis par Marie

On connaît la chanson
Réalisateur : Alain Resnais
Scénario: Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri
Sortie : 1997.
Durée : 2h00
Avec : Pierre Arditi (Claude Lalande), Sabine Azéma (Odile Lalande), Jean-Pierre Bacri (Nicolas), André Dussolier (Simon), Agnès Jaoui (Camille), Lambert Wilson (Marc Duveyrier), Jane Birkin (Jane), Jean-Paul Roussillon (le père d'Odile et de Camille), Jean-Pierre Darroussin (le "jeune homme" au chèque)
Récompenses : Prix Louis-Delluc en 1997. Césars du cinéma 1998 : Meilleur film, Meilleur réalisateur (Alain Resnais), Meilleur Acteur (André Dussolier), Meilleur second rôle masculin (Jean-Pierre Bacri), Meilleur second rôle féminin (Agnès Jaoui), Meilleur scénario (Bacri et Jaoui).

Dès la première image, en dépit des apparences, tout est dit. Une pièce ornée de croix gammées, Von Choltitz en uniforme à son bureau, Hitler au bout du fil. Pendant un instant, on se croit dans un film de reconstitution, projeté dans les grandes obsessions des premiers films d’Alain Resnais : comment filmer la Deuxième Guerre Mondiale, les morts de masse ? Comment filmer après ça ? Mais nous sommes détrompés rapidement : Von Choltitz, de l’air le plus sérieux du monde, entonne la fameuse chanson de Joséphine Baker : « J’ai deux amours ». Le principe est posé : Alain Resnais va jouer à assembler une situation et une chanson ultra-connue, pour provoquer le rire, prendre de la distance par rapport à la réalité, ne rien prendre au sérieux, pas même le tragique de l’histoire. Le présent, comme le passé (de la deuxième guerre mondiale, des chevaliers paysans de l’an mil au lac de Paladru…) qui sous-tend ce présent et y réapparaît de temps en temps (Camille et Simon sont passionnés d’Histoire), reliés entre eux par une rapide série de travelings verticaux, sont contaminés par cette vision à la fois désenchantée et amusée du monde. Une leçon de vie, en somme. Alain Resnais nous propose donc un objet cinématographique expérimental, drôle, léger, ludique, plein de contrastes burlesques et d’humour.

L’histoire
L’histoire, en somme, n’a rien que de très banale, l’intérêt réside donc essentiellement dans la juxtaposition des situations et de ce jeu musical (Alain Resnais réitèrera ce jeu musical dans Pas sur la bouche en 2003). Un couple routinier, Odile et Claude, sur le point d’acheter un nouvel appartement. Un homme plongé dans des incertitudes familiales, médicales et professionnels, qui cherche à louer un appartement et sympathise avec son agent immobilier, Simon – Alain Resnais utilise ce métier apparemment banal et des plus matériels comme révélateur des aspirations, des frustrations ou des hésitations du client comme de l’agent, comme on le verra également dans Cœurs (2006). Des antipathies (entre la thésarde Camille et l’hypocondriaque Nicolas), des sympathies (entre Odile et Nicolas, entre Odile et Marc), des amours ouvertes (entre Camille et Marc) ou cachées (entre Simon et Camille) qui se font et se défont - « ça s’en va et ça revient » comme le conclue Claude François. Les relations entre les personnages se déploient progressivement, en labyrinthe, à travers une série de scènes, en une construction assez théâtrale. Les protagonistes sont en réalité tous reliés, et se retrouvent alors tous ensemble pour la pendaison de crémaillère d’Odile Lalande, pour les explosions et les révélations du dénouement, et le bouquet final musical.

Chansons
Le film est donc émaillé de chansons tirées du répertoire de la chanson française populaire. Le procédé est drôle et ludique, et inspiré de Denis Potter, un scénariste anglais connus en particulier pour trois séries à succès passées à la télévision anglaise ("Pennies from Heaven" (1978), "The Singing Detective" (1986) et "Lipstick on your Collar" (1993)), dans lesquelles des personnages réalistes se mettent à entonner les chansons de leur époque en play-back. Ce procédé permet de parler à un arrière-fond commun au spectateur, qui lui fait « classer » (ou déclasser ?) en quelque sorte la situation et les sentiments du personnage en les rangeant dans un topos littéraire/musical (chanson d’amour naissante, chanson de séparation, chanson d’amitié…). Il s’agit à la fois de provoquer le rire par le décalage, le plaisir de reconnaître une chanson, et de décrire avec une certaine justesse une réalité sous-jacente (comme lors de la scène de séduction entre Camille et Marc). On retrouve ici un thème cher à Alain Resnais, celui de l’illusion et des apparences : la chanson, d’une part, déréalise la situation et met en évidence l’illusion cinématographique, et d’autre part la chanson va derrière l’apparence sociale, la démasque. On peut souligner enfin que, paradoxalement, ce procédé permet de voir la qualité du jeu de l’acteur, qui doit travailler son mime et ses mimiques, et avoir l’air le plus naturel du monde en entamant une chanson qui est le plus souvent inattendue et en décalage (il arrive qu’une femme (souvent Sabine Azéma, qui est particulièrement forte à ce jeu !) chante avec une voix d’homme et vice versa !).

Le réalisateur
Alain Resnais, qui vient de sortir son dernier film, Les Herbes Folles, est né en 1922. Il a donc eu une très longue carrière, et il est à noter que c’est un auteur qui se renouvelle, qui a chaque film se donne des défis, des contraintes. Montrer l’horreur des camps d’extermination dans Nuit et brouillard, faire voir la bombe d’Hiroshima sans y avoir été dans Hiroshima, mon amour, explorer le labyrinthe contradictoire de la mémoire dans L’Année dernière à Marienbad, présenter un film expérimental au sens strict (comparant ses personnages à des souris en cage !) dans Mon oncle d’Amérique, faire du théâtre filmé dans Mélo, faire jouer des dizaines de personnages et de situations différentes par deux acteurs seulement (Pierre Arditi et Sabine Azéma) dans Smoking/No Smoking, etc.… Alain Resnais aime se donner des principes, des contraintes, s’y tenir et en même temps jouer avec, les détourner. C’est ainsi que le film s’achève sur une question : Jean Paul Roussillon regarde un disque, mais ne chante ni ne dit même la chanson en question : « Vous la connaissez cette chanson ? ». C’est ainsi qu’il arrive également que des acteurs disent le texte d’une chanson quand celle-ci est trop attendue ou trop connue (Non je ne regrette rien). Il a joué en particulier massivement sur ce décalage entre texte dit et texte chanté dans la bande annonce original du film.
Contemporain de la Nouvelle Vague, Alain Resnais a toujours su rester indépendant et développer dans ses films ses propres centres d’intérêt. On peut distinguer plusieurs étapes dans son œuvre : tout d’abord la période des courts métrages documentaires comme Guernica ou Nuit et brouillard. Puis la période 1959-1980 jusqu’à Mon oncle d’Amérique où dominent de grandes interrogations historiques (comment filmer après Auschwitz ? après Hiroshima ? après la Guerre d’Algérie ?) et psychologiques (la mémoire, l’inconscient), où il collabore avec de grands écrivains (Duras, Alain Robbe-Grillet, Jorge Semprun…). Puis à partir de 1983, les films d’Alain Resnais sont plus axés sur l’intime, avec des intrigues plus simples, et une forte présence de la théâtralité. Selon Thierry Jousse, quelle que soit la période et le film, en dernière instance, il s’agit pour Alain Resnais de saisir « cette mélodie secrète, cette part de la réalité qui nous échappe et qui nous hante ».
Sur ce film, Alain reprend l’équipe qu’il a constitué progressivement au cours des années 80, qui réunit l’ancienne (la script est la même depuis Hiroshima !) et la nouvelle génération du cinéma français (celle des années 90) : l’équipe de scénaristes-acteurs Bacri-Jaoui, les acteurs Pierre Arditi et Sabine Azéma...

Clin d’œil
On voit donc qu’Alain Resnais est un auteur d’une grande jeunesse, curiosité, inventivité, qui se renouvelle sans cesse, renouvelle ses thèmes, pour tendre vers plus de légèreté. Le film par exemple est cousu de clins d’œil amusants, dont l’un des plus remarquables est celui-ci : dans l’une des dernières scènes du film, Agnès Jaoui et André Dussolier sont sur le balcon et admirent la vue, et leur dialogue (« Ce n'est pas le Panthéon ? », « Non, c'est la Bourse du Travail ») fait directement référence à Zazie dans le métro de Raymond Queneau. Comme Raymond Queneau dans Zazie, Alain Resnais propose ici un film sur Paris, qui joue sur les lieux, les situations, les quiproquos (la scène du restaurant, la rencontre entre Marc et Camille…), la musique, le langage, les prononciations et les voix – de fait, beaucoup de chansons datent des années 30 et font entrer dans le champ du film et le présent de Paris, le passé des voix gouailleuses du Paris d’autrefois. D’où la temporalité très particulière des séquences chantées : elles sont à la fois présentes et passées, elles sont spécifiques à la situation représentée, presque suscitées par la situation précise, et en même temps elles surgissent d’un fonds commun préexistant de chansons françaises populaires – comme Raymond Queneau qui tisse sa prose d’expressions toutes faites ou de citations détournées.

Gaieté et désenchantement
Mais cette gaieté semble être également une façon d’approcher, de ne pas trop prendre au sérieux le vide de ces vies. Il ne faut pas oublier que la dépression est l’un des thèmes centrales du film – elle est commune à Camille, Simon et Nicolas. Les amours malheureuses aussi : les couples qui se délitent (celui de Jean-Pierre Bacri et Jane Birkin, celui de Pierre Arditi et Sabine Azéma, celui de l’inconnue du restaurant), les couples vides, sans amour ni point commun comme celui de Camille et Marc Duveyrier… Le vide des conversations et de la sociabilité, symbolisé par ces méduses qui volent au-dessus des têtes des personnages lors de la dernière séquence du film. La superficialité des relations entre collègues de bureau, l’hypocrisie, l’absence de romantisme, l’incompréhension de la beauté inutile de l’Histoire ou de l’art (Simon est-il agent immobilier ou écrit-il des pièces pour la radio ?). Tout le film se déroule dans un hiver froid, beau, mais aussi un peu triste. De même, la théâtralité de la construction de chaque scène et de leur succession fait parfois de chacune de ces scènes, des dialogues et des lieux, un huis-clos oppressant. Les personnages se heurtent entre eux et errent dans le labyrinthe contradictoire de leurs désirs, de leurs frustrations, de leurs peurs, dont le gigantesque et labyrinthique appartement de la scène finale semble être la métaphore.

Marie Pierre

Bibliographie.
· Thierry JOUSSE : Alain Resnais compositeur de films, ed. Mille et une nuits, 1997
· Gilles DELEUZE, L'image temps, éditions de minuit, collection critique, 1985
· Gaston BOUNOURE, "Alain Resnais", ed. Seghers, coll cinéma d'aujourd'hui, 1974
· BENAYOUN, "Resnais arpenteur de l'imaginaire" - Etudes cinématographiques, n°64-68 et 100-103 (Robbe Grillet)
· Cinéma 80, n° spécial juillet-Aout 1980 – '"Hiroshima mon amour", 1959
· Avant-scène cinéma n°61-62 – "Providence", 1977, Avant-scène Cinéma n°195.